Kalin - Accord PYD/Daech : L' Absurdité d'utiliser une organisation terroriste contre une autre

- Le porte-parole de la présidence turque s'est ainsi exprimé dans une tribune publiée par la version anglophone du journal turc " Daily Sabah"
Kalin - Accord PYD/Daech : L' Absurdité d'utiliser une organisation terroriste contre une autre

« Les détails de l'accord entre les organisations terroristes PYD-YPG et Daech montrent une fois de plus la pauvreté absolue de la politique consistant à combattre une organisation terroriste par une autre ».

Dans une tribune publiée samedi sur le site de la version anglophone du journal turc « Daily Sabah », le porte-parole de la présidence turque a ainsi évalué l’accord entre les deux organisations terroristes, en vertu duquel des centaines de terroristes de Daech et leurs familles ont pu quitter Raqqa, leur capitale autoproclamée en Syrie, vers la province syrienne de Deir ez-Zor en octobre dernier. 

Dans sa tribune, Kalin est revenu sur la guerre en Syrie, qui, à six ans depuis son début, continue de se trouver au centre des affrontements géopolitiques, impliquant d’une manière ou d’une autre, notamment durant ces deux dernières années, tous les acteurs politiques régionaux et internationaux. 

Le porte-parole de la présidence turque s’est surtout attelé sur « les erreurs désastreuses qui ont compliqué davantage et prolongé la guerre en Syrie ». 

« Comme l'administration Obama n'a pas pris de mesures sérieuses même après l'utilisation d'armes chimiques dans la Ghouta, leur soi-disant ligne rouge, l'alliance russo-iranienne a vu une opportunité géopolitique d'entrer dans le territoire syrien », a-t-il avisé. 

Pour Kalin, « l'ascension fulgurante de Daech dans les territoires syriens ne peut en effet être considérée isolément de cet échec colossal à arrêter les massacres du régime d'Assad ». 

Tout en continuant à ainsi évaluer le rôle des Américains sur l’échiquier syrien, Kalin a analysé la logique selon laquelle Washington, dans sa guerre contre le terrorisme, s’est trouvé comme le premier pourvoyeur d’armes au PYD-YPG , afin que cette filiale syrienne de l’organisation terroriste PKK combatte Daech au moyen de ces équipements militaires. 

Cette logique des Américains se trouve désormais affaiblie, « maintenant qu'ils ont largement battu Daech à Raqqa et ailleurs ». 

En effet, bien qu’elle ait assuré Ankara que sa relation avec le PYD-YPG était « temporaire et transitionnelle », Washington a commencé à chercher de nouveaux arguments pour poursuivre sa politique, ne s’apercevant toujours pas de la faiblesse inhérente de cette logique de combattre une organisation terroriste par une autre, a souligné Kalin.

Destinées au début à s’entretuer, les deux organisations ont pourtant conclu un pacte, et en vertu de ce pacte des centaines de combattants de Daech ont fui Raqqa et se trouvent désormais en liberté. « La question troublante que personne ne veut poser à Washington est de savoir qui va empêcher ces terroristes libérés de devenir les prochains kamikazes dans une grande capitale mondiale », a estimé Kalin. 

En vue de décrypter davantage le rôle de Washington et ses liens avec Daech et le PYD-YPG , Kalin s’est appuyé sur les lectures avancées par plusieurs observateurs de la scène régionale. 

Si, selon certains analystes, Washington tient ainsi à maintenir une présence dans l’est de la Syrie, c’est pour contrebalancer la présence russo-iranienne, a-t-il noté. Les énormes quantités de matériel militaire envoyé dans l'est de la Syrie et le grand nombre de postes militaires qui y ont été installés seraient d’ailleurs des indices de cette volonté américaine d’y rester à long terme. 

« Quels que soient les intentions et les plans des États-Unis, la politique malavisée de soutenir la branche syrienne du PKK ne fera qu'affaiblir l'intégrité territoriale de la Syrie et compromettre la sortie de crise politique qui devrait être atteint à la fin des processus actuels de Genève et Astana », a jugé Kalin, qui a évoqué par là même les répercussions d’une telle politique sur la sécurité des pays voisins. 

La Turquie, l’un de ces voisins les plus affectés par la crise, devra, selon Kalin attendre et voir si Washington tiendrait sa promesse et romprait ses liens avec le PKK/PYD après avoir nettoyé Raqqa de Daech. 

« Les Russes et les Iraniens se battent contre Daech, mais dans le but de maintenir le régime d'Assad au pouvoir. Ils s’estiment les gagnants de la guerre depuis deux ans parce qu'ils ont empêché le régime d'Assad de s'effondrer, effacé la menace terroriste de Daech, affaibli l'opposition anti-Assad et réalisé d'énormes gains géopolitiques contre la coalition dirigée par les Etats-Unis », a ajouté Kalin. 

Si le porte-parole de la présidence turque a évoqué les motifs et ambitions géopolitiques des uns et les politiques floues des autres, il a surtout avancé les principes immuables d’Ankara : l’intégrité territoriale de la Syrie et son nettoyage de tous les éléments terroristes et l’éviction de tous les combattants étrangers à l’extérieur du pays. 

L’intégrité territoriale de la Syrie, Kalin l’a répétée à quatre reprises dans sa tribune et préconisé le chemin à prendre pour l’atteindre. « Un gouvernement de transition devrait être établi pour inclure tous les parties syriennes et préparer le terrain pour des élections libres et équitables. Une nouvelle constitution devrait être rédigée pour refléter la volonté et les espoirs de tous les Syriens pour la démocratie, la liberté, la primauté du droit et l'égalité pour tous », a-t-il suggéré. 

« La question du PYD-YPG reste une ligne rouge pour la Turquie. Ils [PYD-YPG] ne peuvent faire partie d'aucune solution politique parce qu'ils sont la branche syrienne du PKK, l’organisation terroriste désignée comme telle par la Turquie, les Etats-Unis, l'Europe et d'autres pays », a prévenu Kalin. 

« C'est pour le moins irrespectueux envers le peuple syrien de les présenter comme des représentants des Kurdes syriens. Il y a beaucoup de Kurdes qui ne s'associent pas au PKK et s'opposent à son idéologie et à son oppression politique, et ils ont beaucoup souffert du PKK et de ses ailes en Syrie. Mais ils sont à peine entendus dans le climat politique actuel. Ils devraient recevoir l'espace qu'ils méritent pour l'avenir de la Syrie », a-t-il renchéri. 

Kalin a également évoqué le sort du président syrien, « qui demeure une question controversée ». Ainsi, selon lui, « il est clair que Bachar al-Assad n'est pas la personne adéquate pour conduire la Syrie vers la démocratie inclusive ». « Compte tenu de ses crimes contre le peuple syrien, il ne peut pas être chargé de réunir tous les Syriens. La future Syrie ne devrait pas avoir de place pour Assad », a-t-il expliqué. 

« Les Russes et les Iraniens, devraient comprendre que le maintien d'Assad au pouvoir n'est pas la façon de protéger leurs intérêts en Syriens », a-t-il ajouté. 

Selon son porte-parole, le président turc Recep Tayyip Erdogan discutera d’ailleurs de ces questions avec ses homologues russe Vladimir Poutine et iranien Hassan Rowhani, lors du sommet trilatéral qui se tiendra le 22 novembre dans la ville russe de Sotchi. 

« Ce sommet est un prolongement des discussions d'Astana. Il ne remplace pas les pourparlers de Genève et devrait être évalué en tant que complément de celui-ci », a tenu à préciser le porte-parole d’Erdogan. 

Toutes les parties devraient, selon ses dires, garder à l'esprit l'unité du territoire syrien et garantir la liberté et la sécurité de tous les Syriens dans le cadre de la résolution 2254 du Conseil de sécurité des Nations Unies du peuple syrien qui ont souffert la douleur impossible à décrire avec des mots qui ne peuvent être ignorés pour la concurrence géopolitique. 

« Le peuple syrien a traversé des souffrances indicibles au cours des six dernières années, et cette saga humaine ne doit jamais être oubliée face aux rivalités géopolitiques », a conclu Kalin.