L'ambassadeur de Turquie à Tunis plaide pour un partenariat mutuellement bénéfique

Nous devons travailler ensemble pour trouver des solutions au déficit commercial », déclare l’ambassadeur de Turquie à Tunis
L'ambassadeur de Turquie à Tunis plaide pour un partenariat mutuellement bénéfique

L’Ambassadeur de Turquie à Tunis, Omer Faruk Dogan, a plaidé pour un partenariat mutuellement avantageux avec la Tunisie qu’il a qualifiée de « pays modèle dans tous les domaines ».

Dans une interview accordée au journal tunisien à grand tirage « Assabah », le diplomate a fait ressortir l’importance des investissements turcs en Tunisie et la volonté d’Ankara de contribuer à la réalisation de projets de développement à même de réduire le déséquilibre des échanges entre les deux pays.

« Le plus grand investissement étranger dans l’histoire de la Tunisie est Turc, C'est l'aéroport d’Enfidha qui a mobilisé 650 millions d'euros », a-t-il noté.

Il a cependant déploré que cet aéroport ne soit pas utilisé de manière optimale. « Bien qu’il est le plus développé, le plus sûr et le plus grand d’Afrique, le taux d’exploitation ne dépasse pas 15% et notre objectif est d’exploiter au maximum les possibilités de ce projet et de réfléchir aux moyens de développer son activité en le reliant à un train rapide avec la capitale », préconise-t-il.

Pour le diplomate turc, l’aéroport d’Enfidha peut être très rentable pour le tourisme et constituer une base reliant l'Europe à l'Afrique pour l’expédition de marchandises à destination de ce continent. Il suggère en outre, d’en faire une base technique pour toutes les compagnies aériennes africaines, qui sont aujourd’hui acculées d’envoyer leurs avions pour maintenance et réparation en Europe, ce qui leur coûte cher et leur fait perdre du temps. « Un tel projet qui serait promu en coopération avec la compagnie Turkish Airlines, apportera une valeur ajoutée à la Tunisie », avance-t-il.

Dogan a, en outre, fait état d’une grande coopération turco-tunisienne dans le domaine du textile et d’autres investissements majeurs turcs dans de nombreux secteurs en Tunisie, en particulier celui du tourisme où trois grandes entreprises du tourisme travaillent sur la destination tunisienne, attirant plus de 400 000 touristes russes l’année dernière.

Il a aussi mentionné la présence d'investisseurs turcs dans le secteur hôtelier en Tunisie notamment à Sfax, Tozeur, Djerba et Hammamet), ainsi que dans les secteurs de l'énergie, de l'alimentation et de la restauration dans plusieurs grandes villes tunisiennes.

Le diplomate a, par ailleurs, rappelé que lors de la Conférence sur l'investissement 2020 organisé à Tunis, le gouvernement turc a fourni directement 100 millions de dollars pour réaliser les projets choisis par la Tunisie en fonction de ses priorités.

Il a précisé que sur cette enveloppe, 50 millions de dollars ont été alloués directement à la Tunisie sous forme de liquidités utilisées par le gouvernement, et la deuxième tranche a été allouée à des projets qui retenus par le gouvernement tunisien et réalisés par l'Agence turque de coopération et de développement (TIKA).

Ces projets étaient destinés à répondre à divers besoins matériels et techniques pour de nombreuses municipalités tunisiennes et à réaliser 15 projets de développement dans différentes régions. Il existe également des projets de soutien aux industries tunisiennes traditionnelles (artisanat) et des projets de soutien au développement agricole et des projets de soutien à l'industrie, parallèlement à des projets sociaux et culturels, a-t-il énuméré.

Evoquant le projet de la zone industrielle mise en place par la Turquie dans la banlieue de Nahli, dans la périphérie de Tunis, le diplomate a noté qu’il s’agit là d’un grand projet éminemment économique visant à mettre en place 1 000 entreprises qui créeraient 250 000 emplois. « Le projet a été discuté par les deux parties tunisienne et turque depuis 2012. Il n'est pas oublié, mais les priorités ont changé compte tenu de la situation dans les deux pays », a-t-il temporisé.

Abordant le déficit qu’accuse la balance commerciale entre la Tunisie et la Turquie au détriment de la partie tunisienne, l’ambassadeur en a relativisé l’ampleur. Il l’a notamment attribué au choix fait par les opérateurs économiques tunisiens d’importer de Turquie des matières premières telles que les textiles et le fer dont ils s’approvisionnaient auparavant en Europe, et ce afin de bénéficier d’exemptions douanières ( zéro % de droits de douanes), à la faveur de l’appartenance de la Turquie à l’Union douanière européenne.

Autre cause de ce déficit : le phosphate dont la Turquie était l'un de ses plus gros importateurs.

L’ambassadeur a fait remarquer qu’en raison des difficultés auxquelles ce secteur a été confronté dans les années 2015, 2016 et 2017 au cours desquelles la production tunisienne a chuté de 8 millions de tonnes à 2,5 millions de tonnes par an, de sorte que la Tunisie n'était plus en mesure de répondre aux besoins turcs de cette matière, la Turquie qui est un pays agricole et utilise largement les engrais phosphatés, était contrainte de s’orienter vers d'autres pays pour s’approvisionner. « Alors que nous importions pour 250 millions de dollars de phosphates de la Tunisie, nous ne dépassons plus aujourd’hui les 25 millions de dollars, ce qui a creusé le déficit commercial. Nous ne pouvons donc pas accuser la Turquie de ne pas avoir respecté l'accord conclu entre les deux pays, la Tunisie n'étant plus en mesure de se conformer à ses dispositions », a-t-il regretté.

Après avoir relevé que la part des exportations tunisiennes vers la Turquie ne représente que 0,01% (soit 400 à 500 mille dinars) sur les 250 milliards d’importations de ce pays, le diplomate a déploré que plusieurs propositions initiées par la partie turque pour booster ces exportations demeurent en suspens, s’agissant notamment de l’organisation pour la première fois, d’un forum économique tuniso-turc à Istanbul. « Nous n'avons pas encore reçu de réponse à cette proposition », s’est-il désolé.

« Nous devons travailler ensemble pour trouver des solutions aux déficits commerciaux », insiste l’ambassadeur Faruk Dogan qui suggère d’œuvrer de concert pour mettre en place un partenariat tripartite entre la Tunisie, la Turquie et l’Afrique. Il juge utile à cet égard, de mettre à contribution les 41 ambassadeurs de Turquie en Afrique afin d’examiner les possibilités et les moyens de coopération avec la Tunisie pour accroître le niveau des exportations tunisiennes vers l’Afrique dans les domaines de l’alimentation, de la construction et autres.

De plus, Turkish Airlines atteint 55 points en Afrique et 270 points dans le monde, ce qui peut être exploité pour servir les exportations et le tourisme tunisiens.

Pour le diplomate turc, la Tunisie qui est « la porte d’entrée de l’Afrique » où elle occupe une position géostratégique importante, peut tirer profit d’une telle orientation, sachant que le continent africain importe 85% de ses besoins alimentaires pour une valeur de 500 milliards de dollars.

« Nous avons tous les moyens pour un partenariat turco-tuniso-africain et nous avons fourni un document de travail pour que la Tunisie devienne un éminent exportateur dans ce continent », a-t-il martelé.

Interrogé sur l’école turque créée en Tunisie, l’ambassadeur a fait remarquer que ce projet a été mis en place par la fondation turque "école internationale maarif", dont le représentant légal est de nationalité tunisienne, sous licence du ministère de l'Education.

Il a indiqué que l'ouverture de cette école s'inscrit dans le cadre de la coopération tuniso-turque, dans le domaine éducatif. Maarif est une école de 150 étudiants, dont 85% sont tunisiens, contre seulement 3 ou 4 étudiants turcs. L’équipe pédagogique est turque.

« Aujourd'hui, nous envisageons d'ouvrir une école secondaire qui dispense des cours jusqu'au baccalauréat », a-t-il annoncé.